Partis suisses et lutte contre la pédophilie: Etude comparative

Suite à notre interview de Mme Christine Bussat de la semaine dernière, le Bureau audiovisuel francophone a pris mandat pour enquêter, très brièvement, sur l’engagement de la plupart des partis politiques parlementaires en matière de lutte contre la pédophilie et sur leur réaction quant à l’initiative populaire demandant l’imprescriptibilité des crimes pédophiles sur les enfants impubères.

Le sujet est certes passionnel, les avis divergent, surtout en ce qui concerne l’initiative, la brièveté du temps d’investigation et notre ignorance de l’engagement personnel de certains membres de certains partis dans des structures locales ou autres ne nous permettent pas, et de loin, de rendre une image exhaustive de la situation; ce à quoi nous ne prétendons d’ailleurs nullement. La présente étude comparative est, par conséquent, à prendre avec beaucoup de précaution, mais permet toutefois, à notre sens, de prendre la "température" de la détermination de certains partis à vouloir en finir une bonne fois pour toutes avec la pédophilie.

L’initiative veut compléter l’art. 123 de la Constitution comme suit: "L’action pénale et la peine pour un acte punissable d’ordre sexuel ou pornographique sur un enfant impubère sont imprescriptibles". L’art.70 du Code pénal (CPS) fixe la prescription de l’action pénale, en cas d’infractions dirigées contre un enfant de moins de 16 ans, en tout cas jusqu’au jour où la victime a 25 ans, et encore, cela dépend du crime. Le Code pénal fait une distinction entre la prescription de l’action pénale et la prescription de la peine. Bref, quiconque a un tant soit peu l’expérience des troubles que la pédophilie peut causer sur un enfant, a aussi conscience que 25 ans, date de l’entrée dans l’âge adulte, sonne souvent le début du retour des souvenirs; or, après 25 ans, il est trop tard.

Une critique souvent entendue contre l’initiative: Elle irait trop loin, serait même extrémiste. Nous pensons, quant à nous, que c’est la pédophilie qui va trop loin et que ce sont ses partisans, actifs ou passifs, qui basculent dans l’extrême. La modification de l’art. 123 s’insère parfaitement dans les définitions des art. 189 à 191, 195 et 196 du CPS. L’imprescriptibilité n’est pas une nouveauté, elle existe pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité; logique: Vous avez fait Auschwitz et n’avez pas envie de voir votre bourreau venir vous narguer 20 ans plus tard, et bien pour la victime d’un pédophile, c’est la même chose. Tout le monde se souvient de cette initiative populaire, entérinée par le peuple en 2004, demandant l’"internement à vie pour les délinquants sexuels ou violents jugés très dangereux et non amendables", la gauche et les grands défenseurs des droits du délinquant avaient hurlé de concert à l’inconstitutionnalité, la mesure sera effective l’année prochaine (modification de l’art. 65 du CPS).

Les critères de notation ont été la persévérance et la régularité de l’engagement du parti, la connaissance du dossier, les actions et la position quant à l’initiative populaire. Ladite notation est basée sur une observation générale et sur les réponses obtenues suite aux divers contacts téléphoniques avec un ou plusieurs représentants des partis en cause. La notation est sur 6. La présente étude n’engage que le Bureau audiovisuel francophone.

Le lecteur doit avoir bien présent à l’esprit qu’il y a une différence entre un parti peu engagé et certains de ses membres très engagés. Nous faisons justement une distinction entre les partis qui tolèrent que certains de leurs membres s’engagent contre la pédophilie et ceux qui les encouragent à le faire. Il y a en outre une vraie différence entre ce que l’on souhaiterait possible et ce qui l’est concrètement, politiquement et légalement. Que les passionnés se tempèrent, tous les hommes politiques ne sont pas des vendus et il est normal que les membres des partis se répartissent les tâches. Néanmoins, on est en droit d’attendre de tout politique une position claire sur ce problème précis.

Certains politiciens très engagés supporteront mal de voir leur parti pauvrement noté, certains autres ne figurent pas dans notre liste, laquelle est tout sauf exhaustive, nous les prions dès maintenant de nous en excuser et nous tenons ici à les remercier et à les encourager pour leur engagement. Des notations individuelles sont exprimées, elles sont appliquées en collaboration avec des personnes, de différentes organisations, engagées dans la lutte contre la pédophilie.

Premier point, aucun parti ne s’est déclaré pour la pédophilie… on respire.

Les bons

UDF (union démocratique fédérale): 6
Pro-actif, l’UDF a fait de la lutte contre la pédophilie SA grande priorité, rien à dire.

POP (parti ouvrier populaire): 5.8
Bonne réactivité à l’initiative, action efficace et sans équivoque. Le POP brille notamment par deux individualités, Marianne Huguenin: 6 et Josef Zysiadis: 6. Le Baf s’est montré très sévère envers le Conseiller Zisyadis pour sa position sur certaines questions de protection de l’enfance, mais il s’agit ici de traiter exclusivement de la pédophilie, donc 6.

PEV (parti évangélique): 5.5
Dans la veine de l’UDF, mais moins présent. Quelques hésitations, semble-t-il; bon bilan en général.

DS (démocrates suisses): 5.2
Idem mais en un peu moins actif, sans problème cependant
.

Les moyens

UDC (union démocratique du centre):4.5
Excellente connaissance du problème, l’UDC encourage ses membres dans la direction de la lutte contre la pédophilie pour autant que leur goût les y porte, pas plus mais pas moins non plus. Présente sur la scène politique et parlementaire, l’UDC a donné certaines preuves de bonne volonté ainsi que d’une bonne dose d’opportunisme; gouverner c’est prévoir. Le secrétariat a réagi de façon ouverte, rapide et efficace à nos questions.

Néanmoins, en ce qui concerne l’initiative, si l’UDC assure partager l’idée et suivre son évolution avec intérêt pour soutenir le principe une fois qu’il passera en votation, elle déclare vouloir renoncer à la soutenir directement en raison d’une fort peu probable "inconstitutionnalité"; une façon habile de ne pas se mouiller si l’affaire devait partir à vau-l’eau. Un juridisme difficilement incompréhensible pour un parti qui a soutenu l’initiative, tout aussi inconstitutionnelle, de l’internement à vie des délinquants sexuels. Prudence mal-venue, peut mieux faire!

Le parti est sauvé par deux bonnes individualités: Oskar Freysinger: 6, plébiscité par nos sondés, à les croire, le plus actif et régulier, et Yvan Perrin: 5.5.

PLS (parti libéral suisse): 4.2
Le parti libéral, Claude Ruey en tête, s’est montré très actif il y a quelques années dans la lutte contre la pédophilie sur internet mais semble avoir bien relâché la pression depuis quelque temps. Il y avait beau jeu à l’époque de se dresser contre la pédophilie, la Suisse était incroyablement en retard, l’opération était rentable et peu risquée. Le secrétariat était au courant et plutôt bien renseigné.

Néanmoins, selon le parti, l’initiative va trop loin dans ses objectifs et est même qualifiée d’extrémiste. L’imprescriptibilité concernerait des crimes "plus graves" comme les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. On aimerait bien revoir les libéraux monter une nouvelle fois au créneau de la lutte contre la pédophilie.

PDC (parti démocrate chrétien): 4
Le plus grand écart entre le parti, compris dans son ensemble, plutôt carrément indifférent, et certains de ses membres, la plus grande proportion d’engagés.

Pas au courant, on sent très clairement que la lutte contre la pédophilie n’est pas La, sinon une, priorité; curieux de la part d’un parti qui compte une proportion record de membres inscrits dans des comités pour la protection de l’enfance, Marche Blanche comprise. Ici aussi, tout fleure bon l’opportunisme de droite, le parti de la "famille" ne semble l’être vraiment qu’au moment des élections.

De nouveau, on n’a plus vu le PDC depuis la conclusion de la campagne contre la pédophilie sur internet. Le PDC n’a, à priori pas d’avis sur l’initiative populaire pour la simple et bonne raison qu’il ne sait pas vraiment de quoi il s’agit. Mauvaise possession du dossier.

Le PDC sauve sa moyenne en raison d’un excellent panel d’individualités: Christophe Darbellay: 6; François Lachat: 6; Chiara Simoneschi: 5.5 qui tient aussi sa propre association de protection de l’enfance au Tessin; Alex Pedrazzini:5.5, formidablement actif mais opposé à l’initiative; on en passe, et des meilleurs. Moins reluisant, le 4 de Lucrezia Meier-Schatz, très active un temps puis ayant retourné sa veste depuis l’initiative, et un gros 0 pour Jean-François Roth, lequel s’est pointé à une Marche Blanche pour inviter les personnes présentes à ne pas signer l’initiative, indélicat…

Les faibles

PRD (parti radical démocrate): 3.8
A la défense du parti radical, signalons que la Marche Blanche a tout simplement oublié de les prévenir de l’initiative (c’est ça le bénévolat…), et pour cause, on ne les voit jamais sur ce front; à croire que cet aspect de la politique suisse ne les concerne pas. 

Au parti radical, on estime que ce qui se fait déjà à présent est "suffisant", et que les dispositions légales actuelles "suffisent"; et rebelote pour le chapitre de la lutte contre la pédophilie sur internet qui est, effectivement, un aspect particulièrement réussi dans notre pays.

Bref, ni convaincu, ni très convaincant.

Les Verts: 2
2 de présence, et encore, c’est beaucoup dire, tant les Verts ont su se montrer discrets; rien, désert, nada, que dalle. Si encore les enfants victimes d’actes pédophiles avaient de la fourrure, on ne dit pas, mais vu que ce n’est pas le cas…

Une Verte saint-Galloise, Pia Hollenstein, aurait, en son temps, été active dans la lutte. Information que nous n’avons pas pu vérifier mais qui semble vraisemblable.

Evidemment, les Verts étaient au rendez-vous du combat contre la pédophilie sur internet, comme tout le monde, mais, depuis, plus rien.

Au bureau central, on n’était pas au courant de l’initiative (sauf les Verts de Bâle, paraît-il), suite à notre coup de fil, on s’est consulté mais, non, on n’est pas d’accord pour autant. L’imprescriptibilité doit être réservée aux crimes de guerre. Il n’y a donc pas "nécessité" d’agir actuellement, même dans la récolte des signatures.

On se souvient, en outre, que les Verts étaient opposés à l’internement des délinquants sexuels dangereux et non amendables. Une proposition de substitution, un projet de remplacement? Non, rien! Apparemment, l’écologie de l’humanité ne les concerne pas.

PS (parti socialiste): 1
Lanterne rouge… Dans une interview du mois de mai, M. Ignace Jeannerat, ancien porte-parole du parti socialiste, nous assurait que la politique du parti en matière de lutte contre la pédophilie était tout sauf laxiste, rien ne vient à l’appui de cette affirmation, au contraire.

Difficile de comprendre les raisons qui motive le PS. Au siège national on est plutôt sur la défensive, après l’interview de Christine Bussat on les comprend. On considère que la Marche Blanche n’est somme toute qu’un vecteur d’action parmi tant d’autres, l’action parlementaire, par exemple, en serait un autre. Mauvaise pioche! On se souvient de la virulence du PS pour contrer l’initiative parlementaire Freysinger pour la non-radiation des crimes pédophiles au casier judiciaire; et hop, petit coup de règle sur les doigts. Si on ne nie pas la capacité de M. Freysinger de "poser de bonnes questions", on lui conteste celle d’apporter de bonnes réponses. De toute évidence, c’est la grille de lecture Sommaruga qui prévaut au parti: Freysinger comme politicien de droite, pardon, d’extrême-droite, ne peut rien faire qui ne soit intéressé voire froidement démago, par conséquent, toute proposition émanant de la droite provoque une réflexologie pavlovienne de rejet systématique (il n’y a pas de traduction de ‘neinsager’ pour la gauche). Partant de là, il suffirait que les partis de droite fassent quelques propositions socialisantes pour détruire, par réaction, le parti socialiste; amusant ou affligeant, c’est selon.

Ainsi la présidente de la Marche Blanche n’a pas tapé si loin quand elle a estimé que le parti faisait de l’opposition gratuite à la lutte contre la pédophilie pour des raisons de basse politique politicienne. Finalement, la lutte contre la pédophilie serait un truc de salauds de droite, extrêmes qui plus est, et la priorité du PS serait, tout d’abord, de défendre les pédophiles contre leurs victimes et le système extrémiste qui voudrait les mettre en taule; et on exagère à peine… 

Au siège du PS, on nous met en garde de ne pas sombrer dans un sentimentalisme à fleur de peau, c’est le comble, mais on dit privilégier la recherche de solutions rationnelles, lesquelles? mystère… Une nouvelle fois, il faudrait faire confiance au travail des parlementaires, si possible sans chercher à s’en mêler; en clair, la politique est un truc trop compliqué pour les citoyens. Pour le reste, pas mal de langue de bois et des oeillères bien en place. On attend plus, beaucoup plus et beaucoup mieux, de la part d’élus qui se disent "socialistes".

Sinon, quelques bonnes individualités, Elisabeth Baume-Schneider: 6, Alain Berset: 5, vu, ensemble avec sa collègue Anne-Claude Demierre, sur le podium de la Marche Blanche Fribourg 2005, Régine Aeppli Wartmann: 5, bien présente sur le terrain de la lutte contre la cyber pédophilie; d’autres membres du PS, nous assure-t-on, mériteraient des 6, mais les noms manquent quand il s’agit de s’en souvenir. En revanche, on garde un souvenir ému de MM. Pierre Tillmanns et Jean-Jacques Schwaab, membres fondateurs à l’heure héroïque de la toute première Marche Blanche. Dans les mauvais élèves, Stéphane Rossini se prend un 2 pour hostilité affichée, Patrice Mugny un 0 pour s’être servi de la tribune qui lui était offerte lors d’une précédente Marche Blanche pour s’en prendre à Freysinger, toujours lui, plutôt qu’à la pédophilie, résultat: le socialiste s’est fait hué par le populo, pourtant pas franchement de droite; bref, ambiance de m… on a la dent dure côté bénévoles. Et, évidemment, champion toutes catégories avec son 0- pointé, Carlo Sommaruga, pour sa tentative incacceptable de distinction entre pédophilie et pédocriminalité en pleine séance de commission parlementaire (propos qui, d’ailleurs, n’ont toujours pas été désavoués par l’organe central du parti); le côté obscur du PSS.

Moyenne de classe: 4.2, peut franchement mieux faire!

Après le maïs sans OGM, le poulet sans hormones et le pinard sans anti-gel, aux prochaines élections, n’hésitez pas à demander le politicien suisse, élevé au grain et en plein air, garanti 100% sans pédophilie; à bon entendeur…

Lutte contre la pédophilie sur internet, voir notre dossier.

Merci à JLF

5 réponses à Partis suisses et lutte contre la pédophilie: Etude comparative

  1. maiabee dit :

    ÉNORME!!!!!

  2. Bouby dit :

    Pour info, Mugny n’est pas socialiste, mais vert.
    Pedrazzini ne s’appelle pas Alex mais Luigi
    Jeannerat ne s’appelle pas Ignace mais Jean-Philippe

  3. Poeme dit :

    Rien d’étonnant en soi si l’on sait que le parti (national) socialiste milite pour une déliquéscence des moeurs et que, comme Cohn-Bendit, ils trouvent que cela fait partie de la vie……………et puis, l’homme – donc l’enfant – n’est-il pas un instrument du régime?

    Quant au 6 attribué à Darbellay, et en tant qu’ancien membre d’un groupe de lutte contre la pédophilie, il me semble un peu surfait. Son comportement, pas très clair à la radio concernant l’initiative de Marche-Blanche et son opportunisme éternel me font douter sincèrement de ses vraies aspirations. Sa venue dans ce combat me paraît plus dédié à ne pas laisser ce combat (porteur!?!) au seul Freysinger.

  4. Kévin dit :

    Personnellement, je ne sais pas comment cette photo a eté prise, mais celle qui décrit l’article, je la trouve affreusement honteuse, même cryptée……

  5. Lucky dit :

    Les personnages controversés et hésitants sinon déconseillants, souffrent tous et c’est le moins qu’on puisse dire…, d ‘ambiguïté, voir plus si !!! A qui pense bien, pense mal ? Ou qui pense mal, pense bien ? Dilemme ou complicité passive ? Va savoir !

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