Francis Richard : Une mauvaise image de la Suisse, piste pour en finir avec l’UDC ?

le-temps.bmpDans son édito du « Temps », d’hier, titré « A Monaco, l’ordre   règne », D.S. Miéville donne une piste pour en finir avec l’irrésistible ascension de l’UDC et de son conseiller fédéral Christoph Blocher. Il se réjouit en termes à peine voilés de la mauvaise image de la Suisse à l’étranger, colportée et fabriquée par lui-même et par ses semblables. Car cette mauvaise image pourrait, par un heureux ricochet, assécher le tiroir-caisse de l’UDC, c’est-à-dire lui asséner le coup fatal. La bonne idée que voilà, digne d’un « journaliste » politiquement correct. Car « Le Temps » vaut bien « 24 heures », sinon plus, quand il s’agit de s’en prendre quotidiennement – et en quels termes – à  l’UDC et à Christoph Blocher.

Mauvaise image ? « On entend des rumeurs de complot et de putsch, écrit le plumitif du « Temps», les parlementaires s’insultent, un ministre milliardaire domine le jeu politique et se livre au chantage en menaçant de paralyser le système institutionnel s’il n’est pas réélu, le pays semble être sous la coupe des criminels étrangers, l’islamisme menace et un puissant voisin médite de nous réduire à merci ».

Miéville a plus de don pour la caricature, et pour les raccourcis, que pour la vérité. More...

Car qui sont l’objet d’insultes ? L’UDC et Christoph Blocher, traités entre autres amabilités de « racistes », voire de « nazis », par détournement du sens de propos tenus, et d’affiches placardées.

Pourquoi Christophe Blocher domine-t-il le jeu politique ? Parce que, en mal d’arguments, les médias dans leur ensemble et certains politiciens en particulier – suivez mon regard, à gauche – le prennent  continuellement pour cible et, par tous les moyens, même légaux, comptent bien l’empêcher de conserver son siège au Conseil fédéral.

Remarque en passant : Miéville parle de Blocher comme d’ « un ministre milliardaire », ce qui, sous sa plume, se veut certainement une insulte, tendance marxiste. Alors que c’est plutôt l’honneur de quelqu’un, parti de peu, d’être arrivé quelque part, ce qui n’est pas le cas de tout le monde…

Christoph Blocher fait-il du chantage ? Il a dit qu’il se soumettrait au choix des parlementaires, mais que le refus par eux de la concordance – toujours observée jusqu’ici par l’UDC – ne pourrait pas être sans conséquences, ce qui est somme toute banal : on ne voudrait tout de même pas que le plus grand parti de Suisse se croise les bras après avoir été exclu.

Le pays est-il sous la coupe de criminels étrangers ? L’UDC et Christoph Blocher ne l’ont jamais prétendu. Ils ont simplement dit qu’il fallait se débarrasser des quelques moutons « noirs » qui mettent à mal la tranquillité de la multitude des moutons « blancs », et prendre les mesures pour ce faire.

L’islamisme menace-t-il la Suisse ? Ils ne le prétendent pas davantage, mais ils ne veulent pas que la construction de minarets, symboles de conquête, l’encourage. Ils fixent simplement des limites, à ne pas dépasser. Il vaut mieux prévenir que guérir.

L’Union européenne – car le puissant voisin ne peut être qu’elle – médite-t-elle de nous réduire à merci ? Ce n’est pas ce que Christoph Blocher et l’UDC prétendent non plus. Ils veulent simplement que la Suisse entretienne de bons rapports avec elle, tout en restant indépendante et neutre. C’est pourquoi ils ont soutenu la plupart des bilatérales, mais se montrent fermes par ailleurs pour défendre indépendance et neutralité.

Comme si cela ne suffisait pas, question image de la Suisse, cerise sur le gâteau, Miéville pose la question qui se veut insidieuse : « L’image vaut-elle mieux quand l’émeute est dans la rue et devant le Palais du parlement, la police absente et ridicule, la sécurité incapable de parer à l’arrivée d’émeutiers annoncés depuis des semaines et les braves gens, comme toujours et partout pris en otage ? ».

Ce que Miéville ne dit pas, c’est que les responsables de cette dernière mauvaise image sont connus et qu’ils se trouvent dans les rangs de la majorité rose-verte de la ville de Berne qui, par la voix de son maire, a reconnu elle-même son impuissance à empêcher les débordements. Pourquoi cette impuissance ? Parce qu’il lui est difficile de s’opposer à cette gauche « autonome » pour qui son cœur balance, même si elle est bien obligée, pour la galerie, d’en condamner les excès.

Toujours est-il que la conclusion de l’article de Miéville vaut son pesant de cacahouètes : « Tout cela (tout ce que Miéville raconte sur la mauvaise image de la Suisse à l’étranger) est-il bon pour le commerce, l’industrie et la finance, sans parler du sport et de l’Euro 2008 ? » Dans l’esprit de Miéville, qui le pense très fort comme dirait Jean-Michel Dolivo, la réponse jouissive est, bien sûr : non.

Il poursuit : « Tout récemment encore, les banquiers se déclaraient enchantés de l’activité de Christoph Blocher à la tête de son département et l’on a bien compris qu’ils sont loin d’être les derniers à remplir la cagnotte de l’UDC. Et l’on comprend bien aussi que le ministre de la Justice est le meilleur rempart contre tout relâchement face à l’UE ». Pour Miéville, le marxiste inavoué, les vilains  banquiers et le vilain Blocher poursuivent donc le même combat de défense du mur de l’argent, notamment en matière de secret bancaire.

Miéville termine ainsi : « Mais à quel moment le cirque de l’UDC sera-t-il trop coûteux par rapport aux services à la place financière ? On observe que, dans les places financières concurrentes, l’ordre règne, aucun putsch ne menace et les boucs sont sans doute interdits en ville ». Miéville n’a-t-il pas enfin trouvé la solution pour en finir avec l’UDC ? Plus l’image de la Suisse sera mauvaise, plus l’UDC sera touchée au tiroir-caisse, parce que la place financière suisse sera elle-même touchée, tandis que les autres places financières ne le seront pas, n’ayant pas l’UDC et le bouc Zottel pour les affaiblir. Il fallait le faire, Miéville l’a fait…

Le lecteur-électeur appréciera…le 21 octobre.

Francis Richard

PS

Je me demandais pourquoi Miéville avait intitulé son article : « A Monaco, l’ordre règne ». J’ai trouvé la réponse, et la source d’inspiration de Miéville, dans un article de son compère du « Temps », Ron Hochuli, paru hier dans le «  Monde ». Ce dernier cite en effet Andreas Gross, conseiller national socialiste : « Les milieux de la finance, qui veulent transformer le pays en Monaco, continueront de défendre le chef de l’UDC. Mais l’affiche des moutons a fait le tour du monde, donnant l’impression que le racisme est toléré en Suisse. Les images de la manifestation voyageront également. Et l’industrie d’exportation devrait entamer une réflexion ».

(Pour ma modeste part je préfère l’ordre qui règne à Monaco en 2007, à celui qui régnait à Prague en 1968…)