Politique suisse: Le verrouillage central

L’UDC s’étend, s’enfle, et se travaille, tandis que le centre et la gauche, circonspects, se demandent s’ils doivent vraiment lui céder un siège au Conseil fédéral. Démocratie quand tu nous tiens.

[cointent_lockedcontent]

Victime de l’illusion d’un véritable pouvoir populaire, qu’elle contribue d’ailleurs abondamment à entretenir, l’UDC s’en vient brutalement donner de la tête contre les montants de son indépassable victoire. C’est historique, aucun parti n’est allé aussi loin, mais c’est aussi évident, aucun non plus ne passera 30%. C’est le principe même de la division des forces si cher à la démocratie.

Tout cet argent, tous ces suffrages, toutes ces volontés conjuguées pour conjurer le spectre de l’idéologie dominante et, à la fin, toujours cette même impression de défaite par forfait.
L’on assiste peut-être là à la première essence de l’érosion de ces institutions qui, à l’instar de toutes les créations humaines, ne sont pas éternelles. La déesse est fatiguée, les libertés, comme la démocratie, finissent toujours par s’user quand on ne s’en sert pas.

Mais comment donc cette victoire du chiffre ne serait-elle pas totale ? Comment monter si haut dans les sondages et se retrouver si faible dans les arcanes du pouvoir là où il se pratique vraiment ? C’est sans doute que ce reste de droite croit pouvoir remporter sur le terrain des victoires de l’esprit et dans les esprits des victoires de terrain. L’UDC se raccroche avec une honnêteté presque touchante aux contraintes d’une réalité dont le clan adverse s’est affranchi depuis belle lurette. Deux idéologies en présence, l’une, minoritaire, disant que la réalité oblige, l’autre qu’elle n’est que ce qu’on en veut bien faire. A chacun sa vérité, disent-ils…
Cette différence fondamentale se traduit de façon assez concrète, les uns pensant que l’Etat est limité par cette réalité matérielle, les autres que cette matière ne connaît que les limites de l’esprit. Mêmes autres qui sont assez vite rappelés à l’ordre par les lois de la nature, mais qu’importe, avec un peu de chimie et une bonne campagne, tout peut passer. L’essentiel n’étant pas de se conformer mais de dominer la réalité pour gouverner.

C’est là que nous touchons à la faiblesse structurelle de la droite actuelle, d’où qu’elle vienne, elle ne repose que sur la preuve matérielle sans être plus capable de s’élever. Le camp adverse fonde le rejet de la réalité dans les profondeurs de sa révolte spirituelle. S’il a certainement tort, sa position n’en reste pas moins supérieure en ce que l’esprit a toujours commandé au corps, c’est lui qui dicte les illusions. En clair, la droite devrait se faire pousser une âme et la gauche remettre les pieds sur terre. L’un est dans la soumission au réel, l’autre dans la soumission du réel, mais tant que le premier n’aura pas choisi sa propre voie, il se verra contraint de sous-traiter les productions de l’adversaire. Et c’est d’ailleurs ce qui arrive, la droite émule volontiers la soupe moralisante de gauche en ce qu’elle est persuadée que c’est le meilleur moyen de toucher les coeurs et les esprits. Nous avons été contaminés par les horizons corrompus de l’adversaire et lui avons cédé le domaine spirituel comme la droite autrefois la direction de l’enseignement. Il y a un esprit et il y a une réalité spirituelle, une vérité qui colle à la réalité terrestre, qui correspond à l’homme et à sa nature. Se priver de cette dimension c’est se condamner à tourner en rond dans le manège monté par l’ennemi.

Les principales écoles de cette vérité spirituelle se sont effondrées il y a quelques années. Comment les remonter ? Peut-être simplement en y croyant, car la politique sans voie spirituelle est peut-être aussi vivante et riche d’avenir qu’un corps sans âme.

Noël Macé

[/cointent_lockedcontent]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *