Bertil Cottier : La SSR ne mettra pas la clef sous le paillasson

Le dernier numéro d’EDITO, le magazine des syndicats de presse Impressum, SSM et Syndicom, qu’on ne peut guère soupçonner de complaisance envers l’initiative no Billag, publie la passionnante interview du Pr Bertil Cottier, spécialiste en droit des médias à Lugano et Neuchâtel. 

L’occasion, pour une fois, de remettre un brin les pieds sur terre et de considérer la question de sang-froid, à mille lieues de la vision d’Apocalypse que certains se plaisent à dépeindre:

Extraits:

Le texte proposé ne prescrit nulle part à la SSR de mettre la clé sous le paillasson. Ce que ce texte prévoit, c’est de soumettre l’audiovisuel à une pure logique de marché.

[…]

En cas de succès de l’initiative, l’obligation de présentation fidèle des événements imposée jusqu’à maintenant à tous les diffuseurs, qu’ils soient financés par des deniers publics ou non, tomberait.

[…]

Le Parlement pourrait la réintroduire pour garantir la diversité des opinions, un principe cardinal en démocratie selon la Cour européenne des Droits de l’Homme. Il y a plus, le Parlement a même l’obligation de procéder à cette réintroduction (même si c’est sous une forme atténuée). En effet, en vertu de la Convention européenne sur la télévision transfrontière de 1989, «le radiodiffuseur doit veiller à ce que les journaux télévisés présentent loyalement les faits et les événements et favorisent la libre formation des opinions »

[…]

L’initiative ne touche en rien à la vocation de service public de la SSR. Celle-ci ne résulte d’ailleurs pas de la constitution fédérale – qui est muette sur l’existence même de la SSR –, mais de la loi sur la radio-télévision (LRTV) qui consacre une vingtaine d’articles à la mission, à l’organisation et au financement du service public. Il faudra donc que le Parlement modifie la LRTV pour réduire considérablement la palette des prestations de la SSR et définir les grandes lignes d’un service public light. Light, et pas zéro, car la Suisse ne peut opter pour un total laisser-faire. En vertu de la liberté de l’expression consacrée par la Convention européenne des Droits de l’Homme, elle est tenue d’assurer, d’une manière ou d’une autre, la diversité des médias audiovisuels et le pluralisme des informations.

On peine à s’empêcher de pouffer devant les inquiétudes du magazine, craignant une perte de « diversité » dans un monde où la SSR exploite, à l’heure actuelle, pas moins de  7 chaînes de télévision, 17 de radio, 8 sites internet, 108 comptes Facebook, 54 Twitter, 32 Instagram, 42 chaînes Youtube, en dix langues.

La pensée du Pr Cottier est là pour calmer les esprits. Résumons-la.

1. La SSR ne disparaîtra pas.

2. L’obligation de présentation fidèle des événements subsistera (elle pourrait même finir par être enfin appliquée…)

3. La vocation de service publique de la SSR ne serait pas atteinte.

4. La SSR pourra disposer d’une concession en 2019.

5. Il n’y aura pas d’interruption des programmes.

L’initiative pourrait même déboucher sur ce service public allégé, plus juste et cohérent, « de qualité » que ces mêmes journalistes, membres des ces syndicats, appelaient de leurs vœux en 2015 déjà (p. 21).

Ainsi, de l’avis même des plus concernés, l’initiative no Billag est une solution mesurée, équilibrée et juste.

Lire l’interview sur le site d’Edito.

NM

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