Francis Richard : Pas de quoi être fier !

Zorro, alias Josef Zisyadis, a le triomphe modeste. Sur son blog il parle de « petite victoire ». Il fait bien.

Il y a un an et demi il s’était précipité à Obwald. Il s’y était installé le temps de faire recours contre la loi fiscale cantonale, votée là-bas en décembre 2005, par 86% des citoyens, instituant un impôt dégressif pour les revenus imposables annuels supérieurs à 300 000 francs. Le Tribunal fédéral vient de le débouter. Son escapade n’a trompé personne, même pas les juges de Mon-Repos. C’est dire. On ne devient pas citoyen de papier d’un canton ou demi-canton.

Cependant il a entraîné dans son sillage trois authentiques citoyens d’Obwald. Leur recours à eux a abouti. Les juges du Tribunal fédéral leur ont donné raison par 6 voix contre 1. Par un jugement rendu le 1er juin 2007, ils ont déclaré inconstitutionnels les impôts dégressifs. Bigre !

Le 2 juin 2007, la TSR rend compte de ce jugement sur son site Internet. Selon la TSR, Danielle Yersin, un  des juges fédéraux responsables de ce jugement, dit que l’impôt dégressif « doit être considéré comme un changement en profondeur du système fiscal. Il introduit une modification de la répartition de la charge fiscale. Certains en profitent un peu plus que d’autres, mais dans une mesure qui selon elle dépasse les limites admissibles ». Pas possible !
 
Un de ses collègues, le juge Alain Wurzburger, également responsable de ce jugement, renchérit :
 
« Aucune justification constitutionnelle ne permet de s’écarter du principe de l’imposition selon la capacité économique ».
 
Or que dit l’article 127 alinéa 2 de la Constitution :
 
« Dans la mesure où la nature de l’impôt le permet, les principes de l’universalité, de l’égalité de traitement et de la capacité économique doivent en particulier, être respectés ».
 
La Constitution fédérale ne dit pas comment respecter la capacité économique. Elle ne dit pas si l’impôt doit être progressif, constant ou dégressif. Implicitement elle dit que les plus riches doivent payer davantage que les plus pauvres. Point barre.
 
Toujours selon le site de la TSR le juge Alain Wurzburger aurait « rappelé que la nouvelle loi fiscale d’Obwald prévoit un taux moyen d’imposition de 2,23% pour un revenu annuel de  300 000 francs et de 1,69% pour un revenu d’un million de francs ». Et aurait ajouté : « C’est choquant ».
 
Or ce qui est choquant c’est que les taux d’imposition repris par la TSR sont totalement farfelus. Ce qui est choquant c’est que, même en admettant la justesse de ces taux farfelus, la capacité économique est respectée comme l’exige la Constitution fédérale. Celui qui a un revenu annuel d’un million paye en impôt 2 fois et demi plus que celui qui a un revenu annuel de 300 000 francs.
 
J’ai retrouvé un calcul que j’avais effectué à l’époque de l’adoption de la loi obwaldienne en me basant sur son nouveau barème d’impôt.
 
Ainsi un contribuable qui avait un revenu imposable de 50 000 francs était imposé au taux de 11,6%. Son impôt s’élevait à 5 800 francs. S’il avait un revenu imposable de 300 000 francs, il était imposé à 15,5% et son impôt s’élevait à 46 500 francs. S’il avait un revenu de 1 million de francs il subissait le même taux d’imposition que celui qui en avait un de 50 000 francs, soit 11,6%. Son impôt était donc de 116 000 francs. Comment peut-on dire que ce dernier ne contribuait pas en fonction de sa capacité économique ? 116 000 francs c’est tout de même plus que 46 500 et 46 500 plus que 5 800.
 
Sans être frais émoulu d’une grande école force est de constater que la capacité économique était bel et bien respectée.
 
Il n’y a donc pas de quoi être fier de s’être basé sur l’argument de la capacité économique pour rejeter une loi votée par le peuple à 86%, qui, sauf avis constitutionnel contraire, reste le souverain.
 
Il n’y a pas de quoi être fier de s’être immiscé dans un domaine qui devrait être du strict ressort des cantons.
 
Il n’y a pas de quoi être fier de s’en être pris au mot dégressif sans tenir compte de la chose, la contribution réelle, respectueuse de la capacité économique, et sans définir de manière objective le dépassement « des limites admissibles » comme l’évoque le juge Yersin.
 
Ce qui est rassurant c’est qu’Obwald aura le dernier mot.
Le 6 juin 2007 une nouvelle mouture a été élaborée par le Conseil d’Etat du demi-canton : tous les revenus à partir de 70000 francs seront  taxés au même tarif.
Ce qui importe après tout ce n’est pas le mode d’imposition, mais son taux. C’est au taux que l’on reconnaît qu’un impôt est confiscatoire et que l’on est ou non dans un régime collectiviste, cher à Zorro, alias Josef Zisyadis.

Francis Richard

1 réponse à Francis Richard : Pas de quoi être fier !

  1. JT dit :

    selon le juge Alain Wurzburger, « Aucune justification constitutionnelle ne permet de s’écarter du principe de l’imposition selon la capacité économique ». et alors comment justifiez-vous, Monsieur le Juge fédéral, les impositions au forfait pour les riches étrangers??

    d’ailleurs, si qqn a la réponse, je suis preneur….

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