Francis Richard : Blocher, laissez-nous roupiller.

Hier Denis Masmejan, dans « Le Temps », fait le commentaire suivant sur les relations entre le Ministère public de la Confédération et son autorité de tutelle administrative, le Département fédéral de Justice et Police :

« Sans son interruption intempestive (celle de Christoph Blocher) dans les affaires du Ministère public, on peut penser que les choses seraient restées en l’état. Les relations entre le procureur général et son autorité de tutelle auraient continué à être empreintes d’ambiguïté, mais n’auraient jamais débouché sur la crise que nous vivons »

En d’autres termes : Christoph Blocher aurait dû se taire. Il ne fallait surtout pas toucher aux relations ambiguës entre le Ministère public et le DFJP. Il fallait se mettre la tête dans le sable plutôt que de provoquer une crise. Il fallait continuer à roupiller comme si de rien n’était.

Evidemment ce n’est pas l’avis de Christoph Blocher qui exécute toujours les choses, comme c’est sa mission de conseiller fédéral de le faire, mais qui ne se prive pas de faire des critiques sur ce qui ne marche pas, pour soulever le débat.

Denis Masmejan, pour une fois, est gentil. Il parle d' »interruption intempestive » au lieu de « provocation ». C’est gentil, mais inexact : »intempestif » signifie « mal à propos », alors qu’au contraire Christoph Blocher a mis le doigt, au bon moment, à l’endroit où ça fait mal. 

Le mot de provocation ne gêne d’ailleurs pas Christoph Blocher qui, dans un entretien publié hier dans « 24 Heures », dit :

« La provocation, c’est important, ça permet de faire avancer les choses. Le mot vient du latin provocare qui veut dire soulever le débat »

La question de fond est la suivante : un conseiller fédéral est-il un mouton, blanc ou noir, c’est-à-dire un simple exécutant, ou est-il autorisé à utiliser sa tête ?

Francis Richard