Comment le terrorisme compromet le projet des islamistes

Et ainsi pourquoi il peut être si aisé aux plus fins de ces derniers, genre Tariq Ramadan ou Malek Chebel, de condamner les actes terroristes commis en Occident: ils ont raison dans leur propre logique, car les terroristes entravent leur effort de subversion. C’est ce qu’illustre le dernier article de Daniel Pipes, paru ce matin dans le New York Sun:

Nike et le 9/11

Cinq ans après les attentats du 11 septembre, il apparaît clairement que le terrorisme a compromis la cause de l’Islam radical.

Les atrocités du 11 septembre ont alarmé les Américains et gêné les efforts discrets mais mortels des islamistes légaux visant à subvertir le pays depuis l’intérieur. Ils ne peuvent plus, aujourd’hui, réitérer leurs succès de l’avant-11 septembre. Cela vient confirmer un processus paradoxal voulant que le terrorisme, d’une manière générale (mais pas toujours), entrave la progression de l’Islam radical. Pour illustrer cette évolution, observons un exemple des temps heureux de l’Islam radical, à la fin des années 1990, lorsque le Conseil des relations américano-islamiques (Council on American-Islamic Relations, CAIR), une organisation islamiste de premier plan, parvint aisément à humilier Nike, Inc., le géant des articles de sport.

Nike introduisit sa ligne «Air» de chaussures de basket en 1996 avec un logo stylisé, en forme de flamme, basé sur le mot Air et apparaissant à l’arrière des chaussures et sur leur semelle. Lorsque les dirigeants du CAIR émirent l’opinion inepte selon laquelle ce logo pourrait «être interprété» comme étant la transcription arabe du mot Allah, Nike commença par clamer son innocence. Mais, en juin 1997, la société avait accepté de prendre plusieurs mesures pour rentrer dans les bonnes grâces du CAIR. Elle avait notamment:

  • «présenté des excuses à la communauté islamique pour avoir involontairement blessé la sensibilité de ses membres»;
  • «rappelé la totalité» de certains modèles;
  • «modifié des livraisons de produits destinés à des marchés ‹sensibles›»;
  • «cessé la production de tous les modèles portant le logo problématique»;
  • «adapté l’organisation de ses services d’arts graphiques afin de renforcer le contrôle du design des logos»;
  • promis de collaborer avec le CAIR «afin d’identifier les ressources de design musulmanes pouvant servir de références futures»;
  • pris «des mesures permettant de sensibiliser ses membres aux questions islamiques»;
  • fait don de 50.000 dollars pour financer l’aire de jeu d’une école islamique; et
  • rappelé quelque 38.000 paires de chaussures dont elle fit effacer le logo incriminé.

Renonçant à toute dignité, la société annonça que «le CAIR se réjouit de l’absence de toute intention offensante envers la communauté islamique» dans le design du logo.

Le directeur général du CAIR, Nihad Awad, répondit avec arrogance que si un accord n’avait pas pu être obtenu, son organisation aurait appelé à un boycott mondial des produits Nike. Le porte-parole du CAIR, Ibrahim Hooper, claironna à ce propos: «Nous considérons cette issue comme une victoire. Cela montre que la communauté musulmane croît et se renforce aux États-Unis. Cela montre que nos voix se font entendre.»

Encouragé par ce succès, Awad se rendit une année plus tard au siège de l’Assemblée mondiale de la jeunesse musulmane (une organisation wahhabite) à Riyad, en Arabie Saoudite, pour annoncer que Nike n’avait pas tenu ses promesses. Il fustigea la société pour ne pas avoir rappelé la totalité des plus de 800.000 paires de chaussures concernées et pour n’avoir couvert le logo Air que d’une fine pellicule et de peinture rouge, au lieu de l’enlever complètement. «L’adhésif peut facilement s’user lors d’une utilisation régulière de la chaussure», se plaignit-il. Il décida donc d’augmenter la pression et lança une campagne «contre les produits Nike dans le monde entier».

Nike capitula une nouvelle fois et, en novembre 1998, annonça la conclusion d’un accord sur «la méthode utilisée pour supprimer le design et la présence continue des chaussures dans les points de vente du monde entier». Elle lâcha des fonds supplémentaires pour financer des installations sportives dans cinq écoles islamiques, elle parraina des événements au sein de la communauté musulmane et elle fit don de produits Nike à des groupes islamiques caritatifs. La presse spécialisée proposa également une contribution financière au CAIR.

Aujourd’hui, tout cela est du passé. Le CAIR peut encore tyranniser de grandes entreprises, comme il l’a fait en 2005 avec la Banque Canadienne Impériale de Commerce, mais il ne parvient plus à leur soutirer de l’argent et il ne peut plus faire passer des affirmations fantaisistes du style Air = Allah. Le public est devenu plus sceptique (quoique pas toujours suffisamment).

Des succès tels que la capitulation de Nike suscitèrent un certain triomphalisme islamique avant le 11 septembre. Un apologiste, Richard H. Curtiss, résuma bien cet esprit, en septembre 1999, lorsqu’il qualifia la décision de Burger King de fermer un restaurant en franchise à Ma’aleh Adumim, une ville juive de Cisjordanie, de «bataille de Burger King» pour comparer l’événement «à la bataille de Badr, en 624, qui constitua la première victoire de la communauté islamique alors largement minoritaire».

Le fait de parler d’un succès de lobbying comme d’une victoire historique sur le champ de bataille montre bien le niveau de confiance en soi atteint par le discours islamique avant le 11 septembre. De plus, ce qui est tout aussi révélateur, Curtiss prédit alors à tort que les Musulmans américains allaient gagner d’autres batailles de ce genre «au cours des cinq à dix prochaines années». Mais les terroristes prirent l’initiative, reléguant en grande partie les islamistes légaux au rôle de combattants d’arrière-garde. C’est ainsi que la violence de masse, paradoxalement, a sérieusement compromis le programme islamiste en Amérique.

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