Pro latina lingua in scholis genavensibus

Ce matin, le journal Le Matin annonce une nouvelle fracassante : « Face à des élèves qui maîtrisent de moins en moins bien le français, la riposte s’organise. Une commission propose au conseiller d’Etat Charles Beer d’introduire le latin pour tous à l’école ». Le ministre se serait dit séduit, des spécialistes jugent que c’est un retour au XIXe siècle.

Le latin dans les écoles, après les églises ? Cela me paraît une bonne idée. On me répondra que c’est une langue morte, je réponds « Erreur » : il suffit d’ouvrir Internet pour voir que le latin est plus vivant que certains patois – en Europe, environ quinze millions de personnes seraient en mesure de le comprendre, selon des enquêtes finnoises €“ ça fait plus que les locuteurs de certaines langues comme le romanche. Journaux, régénération du lexique, traductions de bandes dessinées en latin prouvent qu’il y a là plus qu’un marché : un intérêt.

Et puis, le latin à l’école, c’est une méthode, une manière de former l’esprit – pour reprendre les termes des défenseurs des maths modernes. C’est avant tout, dans notre pédagogie, la dernière façon de faire de la version, pourtant utile dans de nombreux métiers, à commencer par celui de traducteur. Plus largement, c’est aussi une manière d’apprendre à penser en réseaux, en considérant non seulement un mot, mais aussi tout ce qui l’entoure €“ autant dire que ça stimule la compréhension d’autrui. Enfin, ça encourage la qualité et ça aide énormément à apprendre et à stabiliser le savoir en langues modernes. Quand même plus ambitieux que d’enseigner le maniement de Word ou d’Excel, non ?
Il est à noter que l’article rappelle que le canton de Neuchâtel a déjà fait en partie le pas, en proposant des cours de culture antique. A mon humble avis cependant, il est plus que souhaitable de faire du latin davantage qu’un apprentissage anecdotique ou touristique. Ce n’est qu’ainsi que l’apprenant acquerra toute la rigueur de réflexion que le latin peut lui donner. Il s’agit d’une langue, pas d’une visite guidée d’un musée, entre Apollon et Praxitèle… On pourrait même envisager la découverte de textes de la latinité tardive, jusqu’au XXIe siècle (le Moldavo-Russo-Turc Dimitrie Cantemir au dix-huitième, et aujourd’hui Wikipedia et Astérix, par exemple).
Enfin, quand l’Union européenne aura compris que son avenir est dans le latin, les Genevois, habitants d’une cité et d’un canton à vocation internationale, auront une longueur d’avance… ;-) A Genève, la réflexion se poursuit.

Daniel Fattore

Google latina

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *