Michel de Poncins: LIBERER LA MONNAIE

Votre argent vous intéresse

l’économie de marché expliquée à tous   

Nous n’avons pas encore, je crois, beaucoup parlé de la monnaie et pourtant c’est un facteur essentiel de l’économie de marché. La récente crise financière mondiale en offre l’occasion, tout en permettant d’évoquer la planète financière.

Cette crise commence à se calmer. Est-ce le début d’un vrai rétablissement ou, au contraire, l’annonce d’une crise plus profonde ? Personne évidemment ne peut le savoir. Que ce soit une maxi-crise ou une mini-crise, c’est un coup d’avertissement salutaire et absolument nécessaire au sein des économies libres vis-à-vis de toute l’immense et fluctuante planète financière. Certains en profitent pour critiquer le caractère tentaculaire de cette planète financière et c’est, aussi, le moment de l’expliquer et de montrer la nécessité de son existence.

Les hommes n’ont pas changé depuis leur création, il y a peut-être quatorze mille ans et, seules, les techniques ont évolué. Après la chute originelle, il a fallu gagner son pain à la sueur de son front c’est-à-dire apprendre à gérer la rareté ; mais Dieu, dans sa miséricorde sans limite, nous avait laissé nos qualités intrinsèques de créatures supérieures à savoir la mémoire, l’intelligence, et la volonté. C’était suffisant pour dominer la terre et tout ce qu’elle contient. La suite des temps a conduit à une complexité croissante dans l’économie réelle avec à chaque instant l’invention de techniques juridiques et financières pour refléter cette économie réelle.

Et nous voici parvenu dans un monde où, pour nourrir, éduquer, soigner, distraire des milliards d’hommes, il est indispensable d’échanger et de fabriquer une multiplication incroyable d’objets et d’idées. Fabrication, destruction, recyclage se poursuivent sans arrêt. Dans mon nouveau livre « La luxure veillait sur la Ville et la Ville était bleue » (chez François-Xavier de Guibert) je décris le monde en 2052 tel qu’il sera ou ne sera pas : apparemment la tendance ne cessera de s’accélérer, sauf accident majeur ravageant tout comme un tsumani.

La planète financière n’est que le miroir de l’économie réelle ; plus l’économie réelle devient compliquée, plus il faut de formules juridiques et financières sophistiquées pour retracer et sécuriser tous les mouvements.

Les causes immédiates de la crise se situent dans les prêts consentis aux USA à de mauvais débiteurs potentiels, qui n’auraient pas du obtenir de prêts. La fragilité se révélant soudainement, la panique s’est répandue à la vitesse de l’électronique et chacun dans le monde entier s’est lancé dans le sauve-qui-peut.

L’important est de déceler les causes profondes. A déchiffrer les diverses motivations des milliers de grands décideurs de la finance, l’on retrouve inévitablement un mélange, car les hommes n’ont pas changé fondamentalement depuis leur création et leurs qualités se complètent avec beaucoup de défauts. Enumérons sans épuiser le sujet : audace permanente pour bâtir combinée avec des imprudences, ambiance moutonnière avec auto-suggestion en cascade et rumeurs en tous sens, ambition légitime d’améliorer ses profits pouvant conduire à d’autres imprudences ou à des malversations, tentation de la corruption qui est embusquée en permanence, inévitable intervention de personnes malhonnêtes, difficultés d’inventer de nouveaux processus. A cet égard, l’exemple des agences de notation justement accusées est significatif ; les relations financières sont tellement enchevêtrées que leur métier relativement récent a du mal à s’adapter pour arriver à voir réellement clair et à fournir, en âme et conscience, des renseignements exacts.

Des coups d’avertissement sont donc tout à fait nécessaires pour ramener les divers acteurs à la raison. Les Suisses sont plus sages que les autres et l’on a vu tout récemment le directeur d’une des plus grandes banques suisses chassé de son poste sans ménagement parce qu’il avait mis en danger la vie même de la banque en plaçant de l’argent dans des fonds pourris.

Mais pour que l’avertissement soit entendu il faut que chacun joue son rôle. Or, dans le cas particulier, les banques centrales n’ont peut-être pas joué le bon rôle. Elles se sont bornées à inonder le marché de centaines de milliards de dollars c’est-à-dire de fausse monnaie pour masquer la calamité. L’existence même des banques centrales est contraire à la liberté du marché puisque cela revient à donner à de petits groupes et parfois à des politiciens douteux un pouvoir quasi totalitaire sur l’économie. Ce pouvoir est inévitablement exercé selon le bon vouloir de ces personnages, leur bon plaisir et éventuellement leurs propres intérêts financiers. En plus, cela conduit à des allers et retours qui accentuent les mouvements inhérents à la nature des choses.

La conséquence aussi, voire la plus importante, est de déresponsabiliser les acteurs, les brebis galeuses n’étant pas punies comme elles devraient l’être. S’il n’y avait pas eu cette intervention des banques centrales certains des grands acteurs financiers aurait dû se vendre en vitesse à leurs concurrents plus sages et l’avertissement aurait été plus fort.

Toute cette histoire est assez comparable à l’affaire Enron, dont nous avons parlé sans ces leçons à propos de la bourse. C’était des fondateurs talentueux qui inventèrent des produits financiers nouveaux et complexes pour le commerce de l’énergie. Ces produits rendirent de grands services à des millions de gens, car tout le monde aujourd’hui a besoin d’énergie. Sur ce départ, Enron a édifiée une entreprise fabuleuse devenue en peu d’années un phare de Wall Street. La richesse créée était considérable, la capitalisation atteignant 60 milliards de dollars : actionnaires, clients, fournisseurs et 4 000 salariés se réjouissaient.

Dans ce contexte, des personnes malhonnêtes et sans doute grisées par le mirage de l’or se sont livrées à des détournements, des mensonges et de faux bilans. Andersen, l’une des plus grosses firmes d’expertise comptable dans le monde, s’est laissée aussi polluer et tout a disparu dans la tourmente judiciaire et financière. Il n’y avait pas aux USA d’organisme, du type banque centrale, ayant le pouvoir et le désir de sauver les coupables. L’auto-nettoyage naturel dans le capitalisme a conduit l’expertise comptable et le commerce de l’énergie à se perfectionner dans ce monde compliqué.

Souhaitons modestement, maintenant, que la planète financière n’éclate pas complètement avec les dégâts correspondants dans l’économie réelle.

Il faudra aussi revenir dans ces leçons sur les problèmes de la monnaie.

Michel de Poncins

1 réponse à Michel de Poncins: LIBERER LA MONNAIE

  1. Olivier dit :

    « Donnez moi le contrôle sur la monnaie d’une nation,
    et je n’aurai pas à me soucier de ceux qui font ses lois. »

    Mayer Amshel Rothschild (1743-1812)

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