La presse romande ne parle que de ça, le récit de notre envoyé spécial

Nous étions mardi soir au cœur de la manifestation de protestation contre la venue du Conseiller Fédéral Christof Blocher à Lausanne. Manifestation qui comme annoncé précédemment par les médias a dégénéré. Merveilleux ce genre d’évènements prévus de tous sauf visiblement des autorités.

Le rassemblement était prévu pour 17h30 place de la Palud, à l’appel de diverses organisations de gausce et d’extrême gausce (pléonasme). L’ordre n’étant toutefois pas l’apanage de ces moutons noirs, le gros de la troupe arriva avec un bon quart d’heure de retard. Les plus malchanceux n’auront eu le temps d’apercevoir que la traînée de fumée de la pipe de Joseph Zysiadis, celui-ci préférant rester en mode furtif.

Très rapidement, ce qui frappe dans la foule, c’est sa composition peu hétéroclite. A se demander si la manif était réservée aux femmes de la quarantaine, cheveux courts, vêtements kakis ou aux collégiens en guenilles. Il n’y a sans doute pas de familles à gausce, car sur les 800 manifestants initiaux, il n’y a pas l’ombre d’un couple. Peut être l’effet Arlette, la moniale du trotskisme.

Les étrangers étaient également en nette sous représentation, gageons que les organismes de lutte anti raciste protesteront devant cette discrimination manifeste.
La bière à la main semblait de rigueur, ce qui était sans doute pour se donner du courage. Et puis c’est toujours moins lourd qu’une pancarte. C’est aussi l’avis des collégiennes qui ont choisi de se grimer du symbole « peace and love » sur le front les joues, les bras (le derrière ?) en signe de rébellion (la mode est un phénomène cyclique, tout le monde le dit !) Leurs camarades masculins sont plus discrets, limite timides, préférant se planquer derrière des masques « mouton noir », des cagoules, keffieh et autres colifichets terroristes. Il n’était pas nécessaire d’être investi de pouvoirs divinatoires pour connaître dès le début de la manifestation son issue probable : l’émeute avec casse.

Toutefois, la police, timide elle aussi avait choisi d’abandonner les uniformes et de mettre l’appui sur la discrétion, ce qui n’est pas si sympa que la prévention mais quand même nettement plus open que la répression. On aurait pourtant apprécié qu’une convention soit passée avec les organisateurs pour empêcher la présence de personnes masquées au sein du cortège. Ou encore des contrôles d’identité préventifs sur ces brebis galeuses.

Lorsque le cortège s’ébranle enfin, il n’est que 17h45, ce qui laisse aux retardataires en retard sur l’horaire retardé (ouh je m’embrouille là) le temps de le rejoindre en cours de route. Au final ce sont quelques 1200 personnes qui arrivent devant le palais de Beaulieu. De nombreux jeunes (très) s’étant joints au cortège, content de participer à l’agitation plutôt que de faire leur travail scolaire avec leurs parents (ce qu’ils font d’habitude bien sûr, on y croit). Le cortège gratifia au passage quelques façades de jets de fruits et légumes, manière maraîchère d’éprouver son mécontentement face aux protestations des riverains.

A Beaulieu, les policiers avaient choisi de se retrancher dans la halle d’exposition. La meilleure attaque, c’est la défense, c’est bien connu ! D’autres, présents en extérieur (en polo à vélo j’surveille les socialos) se sont sympathiquement écartés pour laisser les casseurs et la presse tourner leur film. Au programme arrachage d’un panneau publicitaire par le noyau dur des casseurs, tout de noirs vêtus et cagoulés pour le film. Le choix des figurants laissait par contre à désirer car en guise de black-blocks zurichois, on s’aperçut vite qu’il s’agissait de collégiens romands pas vraiment taillés pour le rôle. Le moment révélateur fut cette phrase culte digne de la 7e Compagnie, prononcée dans un vaudois parfait « Chuis trop petiiiit pour écrire laaaa ». Ben oui, à 12 ans on ne mesure pas encore les 1 mètres 50 requis pour taguer les affiches de l’UDC. Par contre si on y perd en crédibilité, on a au moins le mérite de faire rire la police.

Au moment de la destruction de ce panneau, les casseurs étaient isolés ; il aurait pu être sympa pour la suite des évènements (et pour le contribuable lausannois) de les appréhender. Mais notre groupe de terreurs aux jambes aussi courtes que leurs culottes est retourné mener l’assaut du centre de congrès.

Après avoir détruit l’entrée de celui-ci, ils sont revenus dresser une barricade devant les quelques policiers présents à l’extérieur pour les empêcher de passer. Action inutile vu que ceux-ci n’ont jamais eu l’intention de passer et n’ont fait que reculer. Maître Dolivo de Solidarités s’est fait gratifier d’un tombereau d’injures (dont Facho, décidément très mode) alors qu’il tentait de décourager les casseurs tandis que la foule excédée par sa crise soudaine d’autoritarisme a commencé à scander « UDC facho, PS collabo ! », preuve que d’une part des inimitiés s’étaient créées dans le troupeau bêlant et que d’autre part, celui-ci ne connaissait pas son pasteur.

La manifestation échappant à tout contrôle des organisateurs, la retraite fut sonnée. Ce qui eut de l’effet sur les ménagères, mais pas sur les jeunes qui bien que de gauche comptaient bien faire des heures sups (ou plutôt en faire faire à la maréchaussée pour être exact).

Comme les autorités n’avaient pas cru bon de retirer poubelles et détritus de la voie publique, les moutons (nains) noirs s’en sont servis contre eux. Note d’ailleurs à la police pour la prochaine fois : il vaut mieux passer une heure avant à faire les poubelles, qu’une heure après à les recevoir sur la tête (enfin question de goût). Même les pompiers venus pour éteindre les foyers (d’incivilité ?) auront droit à se faire taguer leur camion (pas assez rouge ?).

Rouge, c’est la couleur des deux drapeaux socialistes qui flottaient fièrement au centre des groupes de casseurs. Collabo, oui, mais pas trop ! La cohérence doctrinale pourrait sans doute être au programme des prochaines réunions du parti. (enfin moi je dis ça, mais je ne paye pas ma cotise !)

La suite est une stratégie originale pour circonscrire un incident : rabattre la meute vers le centre à coups de gaz lacrymos et de chargettes (il eut mieux valut les coincer et les mettre en charrettes). Au centre ville, ce fut le week end avant l’heure, les protagonistes étant les mêmes (jeunesse lausannoise et police du même cru) et les scènes finalement à peine plus violentes.

Si nous devions tirer une conclusion de cette manifestation de gausce, c’est que l’occasion fait le lardon. On était loin de la casse organisée.

Dans une société où les jeunes sont de plus en plus violents et n’ont surtout plus le moindre respect de l’autorité, il est relativement irresponsable de leur créer des opportunités de rébellion. Il est encore plus irresponsable de ne pas mettre fin rapidement à leurs agissements.

Au final, on en oublie le thème du défilé, preuve qu’il y a d’autres priorités que de s’attaquer à la liberté d’expression de l’UDC.

AF