Francis Richard : Une loi internationale prévaut-elle toujours sur une loi nationale ?

caroline-zuercher.jpgCaroline Zuercher, dans son édito de « 24 Heures » de ce jour, pose implicitement cette question. Elle écrit :

« Nourries par la conviction que rien ne peut aller contre la volonté citoyenne, plusieurs propositions récentes se moquent du respect du droit international, comme l’interdiction des minarets ou l’expulsion des délinquants étrangers. Aujourd’hui, le sort de l’initiative pour l’internement à vie de criminels très dangereux, acceptée par le peuple mais peu respectueuse de la Convention européenne des droits de l’homme, démontre à quel point les libertés encouragées par des esprits populistes peuvent conduire à un cul-de-sac. »

Caroline Zuercher part du principe qu’une loi internationale ne peut qu’être supérieure à une loi nationale. Le peuple ne peut donc s’opposer à une telle loi, quelle qu’elle soit, même si elle est abusive. La loi c’est la loi. Point barre. Il faut l’accepter le petit doigt sur la couture du pantalon. Le peuple suisse, pas plus qu’un autre, n’est libre. Toute tentative de s’affranchir ne peut le conduire qu’à une impasse, ce que Caroline Zuercher appelle un cul-de-sac. 

De cette prémisse Caroline Zuercher tire la conclusion qui s’impose. Si le peuple suisse se prononce contre une loi internationale, il ne peut qu’avoir tort. D’où l’affirmation conséquente que le peuple n’a pas toujours raison… Dans une chronique récente, parue dans « Le Temps », Marie-Hélène Miauton rappelait au contraire qu’en démocratie le peuple avait toujours raison et qu’autrement il ne s’agissait plus de démocratie, mais, au choix, d’un régime censitaire ou d’une dictature…

Plus grave encore Caroline Zuercher ajoute :

« Le mieux aurait été d’éviter ce piège, en ne laissant pas les électeurs se prononcer sur un principe contraire au droit international. »

L’exemple de la « Constitution européenne » est l’illustration de cette mentalité qu’il faut bien qualifier de totalitaire. Cette « constitution » a été refusée il y a deux ans par les peuples de deux pays, la France et les Pays-Bas. Ils avaient tort de s’opposer à une telle loi internationale puisque cette loi relookée, quasiment inchangée, va leur être imposée cette fois sans leur demander leur avis. S’agissant d’une loi internationale, une fois qu’elle sera adoptée, tout peuple de l’Union qui s’y opposera, sur un point quelconque, aura donc tort.

L’argument principal en faveur de la démocratie directe est qu’elle peut défaire ce qui un jour a été mal fait. A contrario Caroline Zuercher est de celles et de ceux qui considèrent que les choses une fois adoptées sont immuables, même si elles sont préjudiciables. Errare humanum est, perseverare diabolicum…

Francis Richard