Tactique du saucisson: Etape 2

Ils ont osé. Le Conseil national a ouvert hier l’adoption aux homosexuels, 7 ans à peine après avoir publiquement promis, dans le seul but de faire passer la Loi sur le Partenariat enregistré, que la chose n’arriverait jamais. 

Les Suisses ont été trompés et il faudra se souvenir, à l’heure des conséquences, quand il faudra compter les victimes, des noms de ceux qui disaient hier que l’adoption ne tomberait jamais et qui l’ont livrée aujourd’hui pour rien, sans même tenter de combattre.

Que penser en effet d’un PDC, dont le président affirmait, sur ce même site, il n’y a pas trois semaines: « Le PACS n’est ni un « mariage bis », ni une porte ouverte à l’adoption d’enfants. Nous avons fait cette promesse au Peuple. Nous la tiendrons » et qui parvient, au sein même de sa formation, à comptabiliser près de 40% de votes favorables ? Si la droite avait la même unanimité que la gauche (100% pour le PS et les Verts), la motion ne serait pas passée. C’est cette inconstance de principe, ce flottement des valeurs, cette gauche dans la droite qui fait toute la force de la gauche dans ce Parlement.

Dossier bouclé

Le débat demandait un peu de courage, il est clos désormais, verrouillé, ne pas être d’accord, oser même rappeler les garanties qui ont été donnée par le passé, c’est être « homophobe », c’est perdre le droit de s’exprimer.

Exit les considérations fondées sur le vrai bien de l’enfant et sur le droit objectif ou non à l’adoption, le contenu des propos tenus au Parlement est un brouet de lieux communs d’une sottise confondante(1), passant du sentimentalisme au juridisme outrancier à besoin.

Du sentimentalisme, on nous en a fait il y a 7 ans, quand il a fallu permettre aux homosexuels de s’« aimer », étant entendu que notre permission leur était absolument indispensable. Du juridisme, quand on a commencé à nous dire que la situation – réclamée alors à cor et à cri par les lobbys d’intérêts homosexuels – créait une intolérable injustice, à destination, et c’est un comble, des enfants eux-mêmes, qui en viendraient presque, si on en croyait nos Parlementaires, à descendre dans la rue pour revendiquer le droit d’être adoptés par des homosexuels.

Injuste

Pour éteindre une injustice on en crée une nouvelle: l’adoption, selon le Conseil national, ne serait ouverte que pour permettre au partenaire enregistré d’adopter l’enfant de son partenaire. Une exception juridique, une inégalité de traitement, une nouvelle « injustice » qu’il faudra résorber à nouveau, dans peu de temps, par Dieu sait quel artifice de langage(2).

A souligner au demeurant que la motion adoptée par le Conseil national enfreint le droit international, ne dit rien de l’éventualité de créer un « troisième parent » avec risque de conflits de droit avec tout géniteur (donneur de sperme, d’ovocyte) et/ou parent potentiel, viole de fait les garanties concédées en termes de procréation médicalement assistée (comment mieux entériner en effet les processus d’insémination à l’étranger ?) et nie, enfin, le droit inaliénable et primordial de l’enfant à une parentalité différenciée.

Dans sa réponse à la motion débattue hier sous le fallacieux prétexte d’offrir les mêmes « chances » pour toutes les « familles » (si ce sont des « familles » quel besoin ont-elle de l’adoption ? Mais qu’est-ce qu’une famille ?), le Conseil fédéral défend que: « La loi a été bien acceptée en Suisse parce qu’elle a supprimé la discrimination des personnes homosexuelles sans pour autant ouvrir aux partenaires enregistrés la voie de l’adoption (et de la reproduction médicalement assistée) », et c’est très précisément le cas, la majorité du peuple suisse a choisi cette loi en ce qu’elle garantissait de façon certaine l’inviolabilité du principe du droit à une filiation différenciée pour chaque enfant. Ouvrir l’adoption à l’enfant du partenaire – avant d’aller plus loin – c’est permettre au tourisme de l’enfant-objet, inséminé, porté, vendu, de déboucher immanquablement sur le délire narcissique d’un pastiche grotesque de famille, c’est reconnaître que l’on a menti avec préméditation, c’est violer la sécurité du droit, le sens de la loi. En 2005, le comité interpartis de soutien à la Loi sur le Partenariat enregistré accusait de « mauvaise foi » et qualifiait de « tarte à la crème » les dires de ceux qui annonçaient ce qui se passe aujourd’hui. Sommes-nous donc si faciles à duper, y a-t-il donc si peu de risque à nous tromper de façon si visible ?

Rôle des médias

La précipitation du Conseil national avait essentiellement pour but d’éviter toute influence du débat français sur les menées helvétiques, ce qui pose encore la question de l’influence des médias, notamment des médias publics, dans cette affaire.

Sommaruga dont on connaît le combat de longue date pour un accès élargi à l’enfant, est apparu hier, sur les ondes de la RTS, infatué de son triomphe, dégoulinant du mépris qui ne l’a pas quitté pendant tout le temps du débat à la Chambre, pour assurer qu’il n’y aurait pas de référendum. Il va de soi qu’une surprise contraire dans ce cas serait des plus rafraîchissantes.

Cette même RTS qui peint des ciels futuristes sous l’égide d’une sorte d’orgie de parentalité familiale barbaresque en produisant des experts aussi incongrus que Maurice Godelier, anthropologue marxiste, qui voit dans le modèle domestique de brousse l’avenir de la civilisation occidentale. Dix pères, autant de mères, l’enfant à la collectivité. Cela ne vous rappelle rien ? Mais si voyons, le délire lénino-stalinien de l’enfant propriété de l’Etat, entraîné à dénoncer ses parents dissidents avant de leur être retirés pour finir confiés à des adoptants dûment reconnus par ce même Etat.

Maurice Godelier est un vieux monsieur, hier, dans la salle des pas perdus, l’on comptait beaucoup de cheveux gris parmi les partisans de la motion. Cette génération a bien fait quelques petits, parmi ceux-ci la secrétaire générale des femmes PLR, Claudine Esseiva, dont l’argumentation confine au paradoxe, et qui vient nous resservir le couplet tant éculé de l’évolutionnisme, jeune = moderne, tout en étant bien obligée d’admettre, devant son évidence de plus en plus criarde, la déferlante de dégoût que la jeune génération s’apprête à déverser sur le « futur » que nous lui fabriquons. Il faut tout de même se lever de bonne heure pour se faire un argument positif de la destruction de la famille, pour oser avancer que la masse des familles re(dé)composées et un taux de divorce à 52 % fondent la justification de l' »homoparentalité ». Comprenez, c’est parce que tout va mal que ce n’est pas grave, en somme, ni même si important de s’inquiéter que tout aille encore plus mal.

Quant à reprocher aux « religieux » leur influence néfaste sur les institutions, c’est oublier sans doute que c’est le parti radical, au temps de sa splendeur, qui s’est mêlé de sacramentel pour asseoir sa domination sur les religions, non l’inverse. Poser le constat d’échec actuel c’est sans doute admettre que le parti radical-libéral n’a pas beaucoup d’éternité à présenter à ses fidèles. Quant à venir réclamer à grands cris la séparation de l’Eglise et de l’Etat, après 150 ans de Kulturkampf et de spoliations institutionnelles discontinues, voilà qui pose là la qualité de réflexion de Mme Esseiva. Quant à affirmer que la demande d’adoption est en continuelle augmentation, cela est faux, là encore, mais le prétendre a cet avantage de faire croire que l’homoparentalité pourrait prêter ses bras à l’étanchement de la misère humaine. Une misère noire qui se dessine à l’horizon, plutôt bas, de la secrétaire générale des femmes radicales pour qui « il faut arrêter avec ce rêve, papa, maman, deux enfants, tout va bien ». Bienvenue dans leur monde.

NM

(1) Exception faite, comme trop souvent, des interventions du Conseiller Freysinger, lequel n’a pas manqué de gifler au passage le jeune Antonio Hodgers lui demandant, alors que le premier soulignait les dangers d’une absence de différenciation sexuelle dans l’éducation: « Monsieur Freysinger, vous avez dit qu’un enfant, pour construire son identité, doit avoir un père car il a besoin de tuer le père. Moi, je n’ai pas eu de père, pensez-vous que j’ai des problèmes d’identité ? ». La réponse de fuser: « Oui ». « (Hilarité partielle) » souligne pieusement le procès-verbal, mais le pire pour M. Hodgers étant certainement l’intervention de son confrère Vert, Geri Müller, reprochant au valaisan la dureté de sa réponse… pauvre chéri.

[-> Mise à jour -> Le Matin mitonne: Dans un article du 14.12, Le Matin, qui relève cet évènement, écrit que la réponse du Conseiller Freysinger a suscité des huées. Il n’en est rien, le lecteur jugera (il y a cependant une incompréhensible huée, plus tôt, quand il s’exprime sur les conséquences de l’absence de père dans l’éducation, un argument pourtant peu passionnel sur le fond). Décidément, Antonio Hodgers a bien besoin de protecteurs dans la cour de récréation.]

A noter que Fathi Derder ne s’en est pas mal sorti non plus (voire le texte de son initiative) de même qu’Yves Nidegger.

(2) Le texte originel de la motion ne permet pas le doute sur les intentions de son auteur: « … de sorte que toute personne adulte, quel que soit son état civil ou son mode de vie, puisse adopter un enfant, en particulier celui de son ou sa partenaire ». Un enfant, pas exclusivement celui du partenaire.

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