RTS: Les chrétiens responsables de la torture envers les animaux

La radio romande a eu une façon bien à elle de célébrer les fêtes chrétiennes cette année. Ce fut tout d’abord, le jour même du Vendredi Saint, cette petite chansonnette ignoble :

A Pâques, le truc humoristique, c’est cette putain de symbolique des miracles et des saints, c’est toujours le même refrain, mais faut bien faire tourner boutique. Un prophète mort et enterré, trois jours après ressuscité, c’est sûr, y a pas à dire, cette histoire est très crédible, mais le business c’est ma seule bible…(1)

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Evidemment, on n’assume pas, on ne s’excuse pas non plus. Tout au plus en vient-on à regretter que votre extrémisme latent ne vous ai pas permis de comprendre toute la substantifique finesse de ce qui n’est en somme qu’une énième saillie de l’antichristianisme universel. Dans certains cas même, viendra-t-on à s’interroger avec inquiétude sur ce qui fait que vous ne vous êtes pas alignés, que vous n’avez pas cru bon de ricaner avec la majorité quand on vous insultait. Quoi que vous disiez, quoi que vous pensiez, le problème ne peut venir que de vous. La radio d’Etat est neutre, elle est juste, elle ne connaît pas de tort, voyons !

Le 16 décembre dernier, à l’approche de Noël, lors de l’émission de vulgarisation scientifique CQFD (2), à propos de la vivisection, l’on a pu entendre asséner, de ce même ton à la fois léger et très docte, une nouvelle succession de vérités incontestables. La méthodologie consiste en un dialogue. L’interviewer, Stéphane Gabioud, fait mine de s’interroger :

Prendre en compte le bien-être des animaux, c’est une notion très récente. Pendant longtemps, les humains les ont dominés et assujettis, hein, ces animaux ?

Le couperet des vérités officielles tombe, inexorable. Sur le ton des doctrines incontestables, Isabelle Moncada, spécialiste autoproclamée des questions de santé à la TV romande, voix grave, index levé, dispense aux masses éparpillées l’énoncé des nouveaux dogmes à vénérer :

Oui oui, c’est une notion très récente. Mais, en même temps, il y a de nombreuses cultures où l’animal était, ou a toujours été, vénéré. Il est toujours aujourd’hui d’ailleurs sacré, ou on prend soin de lui parce qu’il nourrit, parce qu’il porte des charges, qu’il est précieux ou qu’il est habité par des esprits. C’est le christianisme, en fait, qui a introduit cette idée qu’il faut asservir et dominer le règne animal. Et c’est sans doute cette permission, cette injonction biblique, même, qui exhorte les humains à dominer la terre, à soumettre les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et toute bête qui remue sur terre qui a vraisemblablement conduit aux dérives que l’on connaît aujourd’hui, qui les a justifiées du moins dans de nombreuses régions du globe.

Comment expliquer à cette dame que l’avènement du christianisme a mis un terme aux sacrifices d’animaux en orient et en occident, et que, par ailleurs, s’il s’agit d’une « injonction » biblique, elle est donc bien antérieure au christianisme de plusieurs milliers d’années. La religion chrétienne a remplacé le joug millénaire du bouc émissaire par les offrandes du pain et du vin. Le sang de l’Agneau de Dieu, qui étanche tous les péchés des hommes, a remplacé celui des boucs et des taureaux. Mais qu’importe la vérité, la moindre peuplade barbare a plus de chances au tribunal des lieux communs que ce christianisme auquel on semble ne plus pouvoir pardonner d’avoir fondé l’idée même de toute civilisation. Civilisation bâtie sur le respect, le respect religieux, de la Création. Quelle importance ! A la barre, le Christ sur son ânon, François d’Assise, son loup et ses sermons aux oiseaux. Car, si la Genèse fait peut-être de l’homme le maître de la Création (3), elle ne l’en fait pas pour autant le bourreau, le tortionnaire, ou le propriétaire absolu, avec droit indiscerné à l’exploitation jusqu’à la destruction. Le respect du Créateur engage, de fait, celui de ses créatures, de chacune d’entre elles. Mais cela le monde ne peut le saisir, qui ignore ce qu’induisent, chez le chrétien, chez tout croyant naturel, l’amour et la crainte de Dieu. Isabelle Moncada en donne d’ailleurs un exemple des plus probants. Quelques secondes avant l’énormité qu’elle venait de proférer, elle affirmait, toujours avec la même assurance :

En fait, vivisection, c’est un terme qui est né à une époque où on disséquait les animaux à vif, sans anesthésie, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Il faut dire qu’on pensait à tort que ces animaux avait un système nerveux tellement primitif que, par conséquent, ils ne ressentaient pas la douleur.

Et de continuer avec cet exemple glaçant :

Cette idée, qui nous semble aujourd’hui absurde, s’appliquait d’ailleurs également aux nouveaux-nés, dont on pensait également qu’ils ne souffraient pas. Bref, ces croyances ont conduit à des actions abominables. Depuis, heureusement, on donne de la morphine ou des anti-douleurs aux nourrissons quand c’est nécessaire, et les organismes de défense de la cause animale, entre autres, nous ont ouvert les yeux sur la souffrance des animaux.

Puis d’enquiller sur la responsabilité de ces « croyances » à charge d’un improbable obscurantisme chrétien…

Certes, les associations de défense des animaux ont bien fait, mais quand donc la RTS se laissera-t-elle ouvrir les yeux par les associations de défense de ce petit animal qui ne précède le nourrisson que de quelques heures (car, rappelons-le, l’avortement est possible en Suisse jusqu’au neuvième mois [4]) ? Quand donc acceptera-t-on d’admettre que le système nerveux d’un « nourrisson » et celui d’un fœtus ne diffèrent que par l’intensité des cris que ceux-ci peuvent pousser ? Quand reconnaîtra-t-on qu’un curetage déchiquette ces petits êtres, membre par membre, que l’avortement les tue, sans la moindre anesthésie ? Car ce respect de la Création, qui semble faire si cruellement défaut au christianisme, n’est-ce pas le respect de toute la Création ?

N’est-ce pas sur la RTS que l’on entend en boucle, depuis plus d’une décennie, que ledit fœtus, s’il est bien « un être humain », « n’est pas encore une personne humaine » (5), que, s’il s’agit bien « de la vie », ce n’est pas « de la personne » (6) – et qu’il n’a par conséquent aucun droit à la protection contre la souffrance ? Vie qui doit valoir moins que celle d’un condamné à mort (7), et qu’on déclare « mort-née », alors qu’elle a été purement et simplement avortée à des fins d’instrumentalisation de ses tissus (8). N’est-ce pas cette croyance qui justifie l’élimination en série de ces fœtus, porteurs, détenteurs, de la vie humaine aussi bien que les animaux peuvent l’être de la vie animale ? N’est-ce pas une cruauté au moins aussi grave que celle commise contre les animaux ? Car la RTS sait distinguer les fœtus des embryons – toujours relégués au rang de vulgaires « amas de cellules » –, 8 semaines après la conception écrit-elle sur son site (9). Elle connaît aussi sa capacité de souffrance lors d’un avortement pour l’avoir personnellement documentée (10). Son attitude n’est-elle pas la preuve qu’en plus de la connaître, elle l’admet, la comprend et, finalement, l’accepte ? « Un fœticide », entend-on dans une interview, soit « interrompre sa vie juste avant sa naissance, ce qu’on ne peut plus faire juste après sa naissance » (11). De quel côté est le cynisme ?

Etrange pensée qui veut que l’humain soit responsable de toutes les créatures sauf de ses propres rejetons. Que la RTS s’interroge sur ce qu’elle a fait pour ses frères humains et les chrétiens s’interrogeront peut-être sur ce qu’ils font pour le monde animal. Qui est mon prochain ?

Noël Macé

(1) Fantin Moreno, « le chantage du vendredi » de l’émission One-two du vendredi 3 avril 2015, de 09h00 à 10h00 sur Couleurs 3 dès 01:24.

(2) Isabelle Moncada, « CQFD » du mercredi 16 décembre 2015, de 10h00 à 11h00 sur La Première dès 15:16.

(3) « Puis Dieu dit: Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il domine sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur le bétail, sur toute la terre, et sur tous les reptiles qui rampent sur la terre. » Genèse I, 26.

(4) Code pénal suisse, art. 119 al. 1.

(5) RTS, Forum, La Première, 29.12.2013.

(6) RTS, Journal du Matin, La Première, 09.01.2014.

(7) RTS, Journal du Matin, La Première, 17.01.2014.

(8) TSR 1, 19:30, 18.08.2005.

(9) http://www.rts.ch/decouverte/sante-et-medecine/corps-humain/4643044-quelle-est-la-difference-entre-un-embryon-et-un-foetus.html 17.11.09.

(10) TSR 1, Temps présent : Le plus douloureux des choix, 27.09.2001, dès 16:30.

(11) Idem, dès 33:27.

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