Le mariage en 2016 : un homme, une femme ?

pdcLe 28 février prochain, le peuple sera appelé à se prononcer sur l’initiative populaire du PDC « Pour le couple et la famille – Non à la pénalisation du mariage ». Une correction de l’inégalité fiscale entre mariés et non-mariés avec, en sus, une définition constitutionnelle du mariage : « Le mariage est l’union durable et réglementée par la loi d’un homme et d’une femme ».

Ce n’est pas sans une certaine témérité que le PDC a cru pouvoir concilier suffrages conservateur et libéral en emballant cette définition dans une réforme fiscale et vice-versa. L’on peut honnêtement s’interroger sur l’opportunité de ce passage ‘en douce’ de la définition du mariage, comme s’il s’agissait de protéger, sans en avoir l’air, une AOC qui, si elle tombait, risquerait d’ouvrir la porte à l’usurpation de la famille naturelle.

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Le destin des promesses

Le modus operandi semble relever principalement de la situation d’urgence. Urgence pour le PDC de se repositionner sur les valeurs du « C » pour endiguer l’hémorragie de sa base conservatrice, urgence d’obvier à la chute annoncée des garanties qu’il avait données en justification de son soutien à la loi sur le partenariat enregistré (LPart).

Souvenez-vous, en 2005, il s’agissait d’éteindre une inégalité administrative envers les homosexuels. La chose aurait pu se régler avec une modification des règlements hospitaliers et de la fiscalité, mais non, il fallait une loi. Promis, juré, la LPart n’était pas un « mariage bis », et lesdits partenaires n’avaient accès ni à l’adoption ni à la procréation. Si le partenariat entre homosexuels reste un partenariat, tout va bien, il n’y a pas d’inégalité. Mais si le mariage n’est qu’un partenariat entre hétérosexuels, alors les garde-fous de la LPart se transforment de fait en discrimination constitutionnelle. Ce qui pousse alors à évoquer ce distinguo de la nature entre union hétéro et homosexuelle dont plus personne ne semble vouloir entendre parler.

Au moment du passage devant le peuple, le Conseil fédéral était pourtant limpide :

Le partenariat enregistré ne permet pas de fonder une famille, puisque deux femmes ou deux hommes ne peuvent pas avoir d’enfants ensemble (1).

Un mois avant la votation, le chef du Département fédéral de justice et police (DFJP), un certain Christoph Blocher, confirmait la force légale de ces garanties (2). Il ne revenait pas à l’Etat de se substituer aux lois de la nature. Quelques années plus tard, la stratégie Darbellay ayant bouté ledit Blocher hors de la Coupole, la socialiste Simonetta Sommaruga donnait sa propre version de la valeur d’une parole d’Etat, changeant, comme par miracle, le : « Il n’existe aucun droit à l’adoption » du Message de 2002, en ceci :

Le Conseil fédéral comprend le souci des couples homosexuels que les enfants nés d’une relation antérieure ou précédemment adoptés par une personne seule puissent être adoptés par le partenaire enregistré de leur mère ou de leur père. Aujourd’hui déjà, de nombreux enfants grandissent dans pareilles familles, mais ils ne bénéficient pas des mêmes droits que les enfants nés de couples mariés. Ouvrir cette adoption aux partenaires enregistrés mettra tous les enfants sur un pied d’égalité (3).

Imperceptible déplacement sémantique censé extraire de nulle part le droit inédit d’un enfant à se faire adopter par un homosexuel. Ne pouvant crier à la discrimination dans le cadre admis par les homosexuels eux-mêmes lors de l’institution de la LPart, l’on venait d’inventer la discrimination de l’enfant à ne pouvoir être adopté par des homosexuels. S’il n’y a pas de droit fondamental à adopter, il y en aurait un à être adopté. L’exception de l’enfant « préalable » au partenariat n’étant, bien évidemment, qu’une étape sur le chemin d’une adoption illimitée ; stratégie…

Limites naturelles

Ces incursions continuelles, ces sortes de razzias sur la pensée collective poussent le politique à venir donner de plus en plus souvent de la tête contre les limites du droit naturel. Même avec toute la bonne volonté du monde, l’on ne peut créer de Dieu sait quelle visée égalitariste la notion d’un droit objectif fondamental à l’autorité parentale. Pourquoi cela ? Peut-être tout simplement parce que la nature ne l’accorde pas à tous également et qu’elle la réserve au couple exclusivement, soit, par définition, l’union de deux êtres susceptibles de s’accoupler. Et si l’adoption peut suppléer à certaines lacunes d’une nature déficiente, elle ne peut se substituer à cet ordre de la famille naturelle bâtie sur le couple, « élément naturel et fondamental de la société » pour reprendre la Déclaration universelle des droits de l’homme ou le Pacte de l’ONU.

L’enfant n’est pas un droit, ce n’est pas la preuve du couple, c’est une personne. De même, la famille n’est pas la cause du couple, du mariage, elle en est la conséquence. Pas de couple, pas de famille, c’est aussi simple que cela. L’on pourra bien maudire les évidences, inventer de nouveaux mots, réécrire des rayons entiers de dictionnaires, rien n’y fera. Certaines choses sont là, qui se passent allègrement de l’aval l’Etat pour exister. Reste à savoir si « le peuple et les cantons suisses » sont « conscients de leur responsabilité envers la Création », comme dit le préambule de notre Constitution, ou s’ils ourdissent déjà de la guillotiner pour soumettre ses lois qui ne sont pas disparues ce jour fameux où Dieu est mort.

Une faiblesse

La manœuvre du PDC, pour louable qu’elle soit, est avant tout la preuve de la défaite de la pensée rationnelle et objective face aux gargarismes sans limites des délires subjectivistes. Elle apparaît comme un jalon, oublié là pour retrouver le bon sens sous l’avalanche des relativismes.

Si cette définition n’apparaissait pas à ce jour dans la Constitution, c’est que jamais personne n’en n’avait ressenti le besoin. Si elle doit apparaître aujourd’hui, c’est bien que tout ce qu’elle représente, en fin de compte, est en passe de disparaître.

NM

1) 02.090 Message relatif à la loi fédérale sur le partenariat enregistré entre personnes du même sexe du 29 novembre 2002.

2) Conférence de presse du 22 avril 2005.

3) Communiqué Adoption par les homosexuels de l’enfant de leur partenaire, Berne, 22.02.2012.

 

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